Les rendez-vous diagnostic et premier bilan


Partie 2/3

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Jeudi 14 septembre...
J'étais prête beaucoup trop en avance, alors que d'habitude je suis toujours un peu limite. J'attendais que mon mari rentre pour pouvoir lui laisser notre fille et m'en aller. J'étais mal à l'aise à l'idée que j'allais me rendre à un rendez-vous pour un diagnostic d'autisme Asperger. Mais il fallait que je le fasse.

Je ne décris pas tout en détail, même si je semble déjà le faire, car ce serait long, mon appréhension dans le train, mon besoin d'isolement, que j'avais pris un livre en plus de mon casque... Ma nervosité dans ce train que je n'avais pas repris tellement longtemps, que je ne m'étais plus rendue seule nulle part depuis si longtemps. L'adresse sur le GPS de mon smartphone pour être sûre de ne pas me perdre alors que je connaissais parfaitement et la ville et la rue où se trouvait le lieu de rendez-vous, pour y avoir suivi une année de début de formation de libraire. Je connaissais parfaitement le lieu. Mais j'avais mon GPS en main, au cas où. La porte fermée par un code que je ne connais pas, je n'ose pas sonner, par chance, quelqu'un arrive et ouvre la porte, je monte, j'observe les lieux sans bouger, sauf les doigts, que je tortille dans tous les sens.
Puis un petit monsieur avec un drôle d'accent arrive dans la salle d'attente, m'appelle, me tend la main... Il me dit de le suivre jusqu'à son bureau. On discute, il me pose quelques questions sur moi, ma vie, mon enfance, mon présent, ma vie professionnelle, mes passe-temps, etc. Il me propose de faire une liste de ce qui m'a fait supposer avec le SA et j'y réfléchis déjà depuis pas mal de temps à cette liste... Donc j'accepte tout en me demandant ce que je pourrai y mettre. Qu'est-ce qui est pertinent ? Qu'est-ce qui ne l'est pas ? Et s’il trouve ma liste stupide ou ridicule ? Et si je suis à côté de la plaque ?

Le rendez-vous dure environ une heure. Je demande, mal à l'aise, s'il est possible de le fixer le prochain rendez-vous un samedi, lui expliquant le souci de ma fille que je ne peux faire garder en semaine et qu'il est difficile pour mon mari de partir plus tôt du travail trop souvent... Il accepte. Très compréhensif.
Quand je ressors du bâtiment, j'ai la nette intuition que ma mère a essayé de m'appeler et que généralement, le soir, à cette heure, rien ne m'empêche de lui répondre. Alors elle aura dû essayer d'appeler mon mari et j'appréhende l'idée qu'il ait pu lui dire que j'étais absente. Comment justifier mon absence ? Moi qui ne sors jamais...
Mon mari m'appelle, me dit que ma mère a essayé de l'appeler et qu'il a fait une bourde, qu'il lui a dit que j'étais absente, que je lui expliquerai... Sauf que je ne comptais pas expliquer quoique ce soit à qui que ce soit avant d'avoir un diagnostic en main. Je suis contrariée, tendue, angoissée, je n'aime pas ce genre de situation, je suis mal à l'aise... Mais je me dis que ma maman doit s’inquiéter, de son côté, et il n'y a pas de raison, alors je l'appelle, et lui explique mes doutes, en précisant que je me sentais bête d'en parler avant d'être sûre. J'ai eu droit à quelques phrases clichées, mais qu'importe... J'ai été entendue, respectée, soutenue. On a discuté un moment, elle voulait mieux connaître le syndrome et la raison de mes doutes, pour finir ça glissait tout seul, je lui expliquais... Voilà pourquoi, même si j'étais mal à l'aise, je n'ai pas cherché à le cacher à ma maman. Et je lui ai proposé d'en parler à mon papa, qu'il sache aussi. Mais je ne me sentais pas de réexpliquer encore une fois.
Une fois rentrée, mon mari voulait savoir "Autiste ou pas ?", mais je n'en savais rien. Le diagnostic ne se fait pas en un rendez-vous et le psy n'avait rien laissé paraître. Je n'en avais donc aucune idée.
Puis nous n'en avons plus reparlé.

Rendez-vous suivant, le samedi 7 octobre à 9h00. On discute du rendez-vous de la fois d'avant, il me fait passer le bilan du Quotient Empathique (QE).
Rendez-vous suivant, le samedi 4 novembre à 9h00. On entame le Quotient Autistique (QA).
Le lundi 27 novembre, je contacte le psy par SMS pour lui demander une adresse mail à laquelle envoyer la fameuse liste de suppositions concernant le SA. Il me répond aussitôt et, le mercredi 29 novembre, j'envoie ma liste, pleine d'appréhension.
Rendez-vous suivant, le samedi 2 décembre à 9h00. On discute un moment du mail que j'ai envoyé, le psy mer remercie pour ce mail et revient sur certains points, ce qui permet de terminer le Quotient Autistique plus facilement. Il calcule les résultats et j'obtiens 8 au QE et 42 au QA. Je suis donc largement dans la zone Aspie.


Le psy me dit que je dois recontacter la première personne, madame F.G., avec qui j'avais eu contact et qui m'avait aiguillé chez lui, car c'est elle qui terminera le diagnostic avec un second avis, un complément et quelques tests et examens supplémentaires. Il me donne la carte de cette autre psy afin que j'aie son mail et que je n'aie pas à l'appeler.
Le jeudi 7 décembre, vers 12h15, je me décide enfin à fixer ce rendez-vous. Je reçois une réponse le soir même, pour un rendez-vous fixé au lundi 18 décembre, à 10h00. C'est en semaine, une autre heure que d'habitude, mais je ne m'inquiète pas trop, car mon mari est en vacances à la date proposé et le rendez-vous se passe dans le même cabinet que d'habitude. Je n'ai donc que l'heure qui change, et de pas grand-chose. Tout va bien. Je confirme donc, après avoir malgré tout vérifié avec mon mari que tout soit ok.

Arrive le lundi 18 décembre, tout se passe relativement bien, bien que les horaires de train ont changé, donc je dois être attentive. Les gens qui prennent les transports le lundi matin à 9h00 ne sont pas les mêmes que le samedi à 8h00. Un peu plus, et je me fais "voler" ma place habituelle, à côté des portes de sortie. Mais j'arrive à l'avoir. Le train suivant est annulé, je dois en prendre un autre qui m'amène à l'autre bout de la gare, j'essaie de rejoindre le chemin que je fais habituellement, et me rends à mon rendez-vous. La psy est très sympa. On discute un petit moment, elle me pose quelques questions, et on soulève le sujet de passer un test de QI, que d'après mon fonctionnement (et non mon intelligence) cela peut valoir la peine de vérifier et un rendez-vous est fixé au lundi 15 janvier 2018 à 10h00. Après quoi, je m'installe pour passer le test de perception et reconnaissance des émotions, l'eye-tracking, puis le LIS (Lecture Intentionnelle en Situation) et enfin le Raads-14.

J'ai reçu une copie du rapport préliminaire envoyé au premier psy le soir même et voilà les résultats obtenus :
  • Eye-tracking : "Il n’apparaît pas des saccades atypiques - Il apparaît un balayage visuel qui s’apparente au TSA. Ses points de fixation sont de 0.58 ± 0.3 et sont équivalents à ceux retrouvés chez les Asperger (0.693 ± .31) [...]. Les neurotypiques ont obtenu, quant à eux, des points de fixation en seconde de 0.491±.015."
  • Perception et reconnaissance des émotions : Résultat dans la norme (75%) mais atypique. "En effet, elle reconnaît partiellement la colère (75% de réussite soit 3 images sur 4) ; l’absence d’émotion est complètement reconnue (100% de réussite) ; la joie est reconnue à 50% (1 image sur 2) et la peur n’est absolument pas reconnue (0% de réussite). Ce profil hétérogène est souvent retrouvé chez les personnes Asperger qui ont su remédier à leur problématique de traitement perceptif par l’utilisation de leur capacité cognitive. D’autre part, les personnes Asperger sont les seuls à reconnaître à 100% l’absence d’émotion ; en effet, dans la population générale, l’absence d’émotion reste plus difficile à détecter par rapport à une émotion."
  • LIS : J'obtiens un résultat de 20.8. "Les résultats obtenus [...] ne se situent pas dans la norme de la population générale (score de 10.8 +/- 2.9). Cela signifie que les cognitions sociales de Mme [...] sont déficitaires."
  • Raads-14 : Mon résultat est à 36. "L’étude de validation du test a montré que les adultes ayant reçu un diagnostic d’autisme ou de syndrome d’Asperger ont obtenu une médiane de 32. D’autre part, il apparaît également un déficit de mentalisation (18/21), une anxiété sociale de 9/12 et une forte hypersensibilité sensorielle (9/9). Les scores de Mme [...] vont dans le sens d’un syndrome d’Asperger."


Tout ceci est allé extrêmement vite, entre le 14 juin où je découvre le syndrome autrement que par les médias - qui faussent atrocement son image - et le 18 décembre, jour où j'ai reçu un rapport préliminaire confirmant pratiquement mon syndrome.
J'attends néanmoins le rapport final pour en parler, on ne sait jamais. Et j'attends également avec beaucoup d’appréhension mon rendez-vous pour le test de QI.